Connaissez-vous cette histoire tirée du livre La Métaphore : voie royale de la communication, de Gérard Szymanski ?
Le démon marchait le long d’un chemin à travers deux grands domaines dans lesquels des agriculteurs s’affairaient à la récolte.
Il se dit : « Je vais planter un peu de ce que les humains aiment tant : avoir toujours raison ! »
Il se coiffa d’un chapeau dont la moitié droite était verte et l’autre jaune.
« Si vous voulez trouver un trésor, suivez-moi ! » cria-t-il aux paysans.
Puis il se cacha derrière un arbre. Les travailleurs coururent jusqu’au sentier.
« Nous allons suivre l’homme au chapeau vert », dirent les hommes du champ de droite.
« Vous voulez nous tromper : nous devons suivre un gars qui porte un chapeau jaune ! » s’écrièrent les hommes du champ de gauche.
Le conflit empira.
Une demi-heure plus tard, les paysans avaient oublié le trésor et s’entretuaient à coups de faux pour savoir qui avait raison quant à la couleur du chapeau. »
Je viens de la découvrir et elle m’a aussitôt fait pensé à une anecdote.
J’assistais à un séminaire sur le Lean (méthode d’amélioration continue développée par Toyota à la fin de la seconde guerre mondiale), la première partie venait de se terminer et je venais de rejoindre les autres pour la pause.
Ca discutait ferme !
Quelle était la raison de ce brouhaha ?
A tous les coups … il n’y avait plus de café !
En y regardant de plus près, ça ne devait pas être ça. A coté de ceux qui parlaient, il y avait ceux qui tripotaient fébrilement leur smartphone.
Que se passait il encore ?
Un nouveau gouvernement ? une nouvelle hausse des impôts ?
Perdu !
La question était de savoir ce qu’était réellement un poka yoke.
Pour ceux qui ne le sauraient pas, poka yoke est un mot japonais qui veut dire « détrompeur ». En pratique, c’est quelque chose qui rend l’erreur impossible (par exemple, vous ne pouvez pas monter la pièce gauche à la place de la pièce droite).
Le sujet du débat était de savoir si le « presque impossible » était admis ou pas (il n’y a vraiment que des experts qui peuvent prendre une « pause » en se posant ce type de questions).
Certains l’acceptaient bien évidemment, les autres le rejetait catégoriquement.
Chacun racontait comment ça se passait « chez lui ».
Les uns citaient Toyota, les autres les grands gourous du Lean. Google lui même était sollicité.
Si chacun admettait que le « totalement impossible » répondait à la définition et qu’écrire en police 78 et en rouge sur l’ordre de fabrication ne répondait pas (faut pas exagérer quand même ), il demeurait impossible de trancher lorsque l’erreur était possible mais tellement évidente qu’elle sautait aux yeux de n’importe quel béotien.
J’aurais pu, moi aussi, mettre mon grain de sel et sortir mon « dark side » comme le disait amicalement mon ancienne responsable américaine.
J’aurais pu demander si un poka yoke empéchant totalement une erreur qui se produit une fois tous les dix ans méritait le tableau d’honneur alors qu’une … chose dont on ne connait pas le nom qui préviendrait à 99 % un problème journalier serait juste bonne à jeter aux orties ?
Mais je voulais surtout un café !
D’ailleurs l’animateur mettait fin au débat en rappellant à tous qu’il était temps de retourner dans la salle pour la suite du programme.
Vous, je ne sais pas, mais moi, quand j’achète un produit, la seule chose que j’en attends … c’est qu’il fonctionne et n’aie pas de défauts.
Que ce résultat, somme toute « normal », soit le résultat de poka yoke, vrais ou faux, m’indiffère totalement.
Lorsque nous sommes entre spécialistes, nous nous faisons facilement « des noeuds au cerveau » avec des détails techniques qui n’intéressent que nous …et le diable qui est, parait-il, dans les détails
Vous avez certainement vos propres anecdotes. Partagez les avec nous !
A bientôt
Cet article a été écrit dans le cadre du défi lancé par Cédric du blog virtuose marketing
Crédit photo: fotolia © Masson